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Les sujets d’actualité ne manquent pas pour un éditorialiste. À l’heure où j’écris ces lignes, nous sommes à quelques heures de la cérémonie d’investiture du président Trump qui représente un évènement majeur en ces temps chaotiques. Néanmoins, c’est un autre sujet qui me préoccupe. Depuis que je m’intéresse à l’institution judiciaire, je la vois se transformer à bas bruit, par touches successives mais d’une manière qui me semble à la fois profonde et irrémédiable.
Cette transformation est le produit d’une conjonction d’intérêts. D’abord celui d’un État qui semble vouloir se désengager de ses obligations jusque-là réputées régaliennes. Pour des raisons qu’on dit avant tout budgétaires, il se défausse sur d’autres du soin de rendre la justice. On en connait les nombreuses manifestations en droit positif. La médiation a ainsi pu connaître des réformes successives qui en ont étendu le champ d’application et simplifié les modalités d’exercice depuis la loi inaugurale du 8 février 1995. Sur un autre registre, après que les textes organisant l’arbitrage ont été modifiés en 2011, voici que la Chancellerie met aujourd’*** sur pied un groupe de travail chargé d’évaluer les besoins d’évolution du droit français en vue de préparer sa modernisation.
Ces réformes passées ou à venir sont accompagnées de discours censés les légitimer. La justice qualifiée de formelle serait ainsi dans l’incapacité de résoudre toute une série de litiges. Il faudrait lui en substituer une autre, transactionnelle ou restaurative. Des mots tellement plus doux et bienveillants… Dans d’autres domaines, c’est plutôt la compétitivité et la concurrence qu’on met en avant. Ainsi en matière d’arbitrage, le maintien de la primauté de ce qu’on dénomme la place de Paris pourrait justifier une extension de son champ d’exercice. Après le droit des affaires viendrait le tour du droit social ou celui de la famille. De manière générale, il est aussi fait référence à un juge qui aurait intérêt à se recentrer sur le cœur de son office consistant à trancher certaines catégories de litiges en laissant à d’autres le soin de prendre en charge ce qui relèverait désormais de la périphérie.
Autant de discours qui sont relayés par les professionnels du droit. De longue date, les notaires se vantent d’être des juges de l’amiable afin d’empiéter sur le domaine régalien. Et des avocats en voie de paupérisation invoquent de manière récurrente la promotion de l’État de droit et la défense de l’accès à la justice pour tenter d’accroitre leurs champs d’intervention.
C’est un classique : la défense des intérêts catégoriels se pare souvent de la promotion de l’intérêt général. Mais pour quel résultat ? Est-ce que nous souhaitons que la justice passe des mains de l’État à celles de professionnels dont beaucoup se transforment en marchands de droit ? Et voulons-nous réinventer l’ancienne pratique des épices ? Autant de questions que je me pose en attendant de lire le rapport que nous délivrera bientôt un aréopage de spécialistes fortement intéressés par l’extension du domaine de l’arbitrage. Pour l’heure, je me contente de méditer les mots qu’une femme jeta un jour à la face de l’Empereur Trajan : « Je te requiers justice que tu me dois ». Des mots qui furent à l’origine d’un modèle de justice que nous serions peut-être en train d’abandonner. Ce qui nous ramènerait à ce que représente le retour au pouvoir de Trump au sein de la nouvelle Rome : l’abandon des croyances dans la vertu des fonctions étatiques.
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